Lignes directrices de l'OMS contre la stigmatisation en santé mentale au travail
- Patrick Dufault, CRHA

- il y a 4 jours
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Le défi de la stigmatisation en santé mentale et de la discrimination en milieu de travail, qui touche particulièrement les personnes vivant avec des troubles mentaux, est un enjeu fondamental reconnu par l'OMS et l'Organisation internationale du Travail (OIT).
Voici les lignes directrices et recommandations de l'OMS (souvent renforcées par l'OIT) pour lutter contre la stigmatisation en santé mentale au travail.
1. Objectifs généraux des lignes directrices de l'OMS contre la stigmatisation en santé mentale au travail
Les lignes directrices de l'OMS sur la santé mentale au travail, renforcées par une note d'information conjointe avec l'OIT, visent à :
Soutenir la prévention des risques pour la santé mentale.
Protéger et promouvoir la santé mentale au travail.
Soutenir les personnes atteintes de troubles mentaux afin qu'elles puissent participer au monde du travail et s'y épanouir.
L'OMS a également souligné que le bien-être individuel est une raison suffisante pour agir, mais une mauvaise santé mentale peut également avoir un impact débilitant sur la performance et la productivité. Un objectif clé est d'améliorer la prise en compte des besoins des travailleurs souffrant de troubles mentaux et de proposer des interventions qui facilitent leur retour au travail et leur accès à un emploi rémunéré.
2. Stratégies clés pour la lutte contre la stigmatisation (Axées sur l'organisation et ensuite sur les individus)
L'OMS recommande que la prévention des problèmes de santé mentale au travail passe par la gestion des risques psychosociaux (RPS) en milieu professionnel.
Les nouvelles lignes directrices de l'OMS (y compris celles de 2024-2025 selon les sources) mettent l'accent sur trois axes d'action principaux pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination :
A. Interventions organisationnelles (Prévention primaire)
Ces interventions sont directement axées sur les conditions et le cadre de travail et visent à modifier ou à éliminer les risques psychosociaux à la source.
• Adaptation du milieu de travail : Mettre en place des modalités de travail concrètes et adaptées, comme des horaires souples, des aménagements individuels ou un soutien accru.
• Prévention de la violence et du harcèlement : Mettre en place des dispositifs pour faire face à la violence et au harcèlement au travail.
• Climat de sécurité psychosociale : Normaliser l’inclusion et reconnaître la santé mentale comme un aspect fondamental du bien-être au travail pour tous. Un milieu de travail sain favorise l'inclusion en permettant aux employés de poser des questions, de faire valoir leurs intérêts et de signaler des problèmes sans craindre de conséquences néfastes pour leur emploi ou leur carrière.
B. Formation des cadres et des dirigeants
La protection et la promotion de la santé mentale au travail impliquent de renforcer l’aptitude du personnel d’encadrement à déceler les problèmes et à prendre des mesures en conséquence.
• Rôle de la formation : Former les cadres aux questions de santé mentale pour les aider à percevoir la détresse émotionnelle de leurs subalternes et à agir en conséquence.
• Compétences relationnelles : Développer les compétences relationnelles des cadres telles que la communication ouverte et l’écoute active.
• Compréhension des RPS : Faire mieux comprendre comment les facteurs de stress au travail affectent la santé mentale et comment on peut y faire face. Les gestionnaires devraient également être formés pour aider les employés ayant des difficultés d’ordre psychologique à retourner au travail de façon durable en toute sécurité.
C. Interventions au niveau des travailleurs et individuels (Sensibilisation et soutien)
L'OMS recommande également des interventions visant les travailleurs eux-mêmes :
• Sensibilisation générale : Former les travailleurs pour qu’ils soient mieux sensibilisés et aient de meilleures connaissances en santé mentale, et pour que les personnes ayant des problèmes de santé mentale au travail soient moins stigmatisées. Le fait d'offrir des programmes d'éducation et de formation aide chacun à comprendre l'importance de leurs actions et de leurs gestes.
• Réduction de la stigmatisation : Prendre des mesures pour réduire la stigmatisation liée aux problèmes de santé mentale, y compris le trouble de stress post-traumatique (TSPT), et encourager les travailleurs à obtenir l’aide dont ils ont besoin.
• Interventions individuelles : Mettre en place des interventions destinées aux individus pour leur apprendre à gérer le stress et à réduire les symptômes en cas de problème de santé mentale (incluant des interventions psychosociales et des possibilités d’exercer une activité physique).
3. Les impacts négatifs de la stigmatisation
La stigmatisation et la crainte de la discrimination constituent l'un des principaux obstacles à la santé et à la sécurité psychologique au travail. Elles peuvent entraîner pour l'individu une faible estime de soi, des expériences négatives au travail, et la peur de révéler ses problèmes de santé mentale et de consulter. La stigmatisation peut aussi être un des principaux freins à la recherche de soins, incitant près des deux tiers des personnes atteintes à ne pas chercher l’aide dont elles ont besoin.
Pour l’organisation, la stigmatisation peut engendrer :
• Du présentéisme et de l’absentéisme.
• Une diminution de la productivité et de la participation des employés.
• Des difficultés à attirer et à maintenir en poste les talents.
• L'augmentation des coûts liés aux blessures et aux troubles de santé mentale.
Le fait que 47 % des employés canadiens estiment que s'ils révélaient une maladie mentale à un patron ou à un collègue, leur capacité à accomplir leur travail serait remise en question, illustre l'ampleur du défi de la stigmatisation.
Prochaines étapes suggérées :
Pour traduire ces lignes directrices stratégiques en actions concrètes et mesurables pour votre organisation, il serait pertinent de se concentrer sur l'évaluation des initiatives anti-stigmatisation.
En ce sens je vous propose d'analyser les indicateurs de performance clés (KPI) et les méthodes d'évaluation recommandées pour mesurer l'efficacité des stratégies de réduction de la stigmatisation. Ceci vous permettra d'assurer un retour sur investissement positif (le rendement des programmes de santé mentale d'une durée de plus de trois ans ayant un retour sur investissement médian de 2,18 $ pour chaque dollar investi, selon Deloitte Insights).

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