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Les désaccords au travail : risques et opportunités (3/3)


Rester zen dans la confrontation


Comme nous l’avons vu dans les deux derniers articles, la vérité se trouve dans la zone de turbulences, dans la groan zone. Elle émerge d’une tension créative, et c’est pourquoi il est important de ne pas tomber dans le conflit de personnalités mais de rester dans la confrontation d’idées.


C’est ici que la mindfulness, la présence attentive, peut nous aider. À ce propos, une citation me revient en tête :


« En général, nous sommes très attachés à nos pensées et à nos sensations, quelles qu'elles soient, et nous nous fions aveuglément à leur contenu, comme s'il s'agissait de la vérité, en reconnaissant rarement que pensées et sensations sont en réalité des événements discrets au sein du champ de la conscience, des apparitions minuscules et fugaces qui sont le plus souvent, au moins en partie, sinon essentiellement, inexactes et peu fiables. »


Cette pensée de Jon Kabat-Zinn, inspirée de la philosophie bouddhiste, résume ce que nous enseigne la pratique de la méditation en présence attentive : que tout est impermanent et que, par conséquent, il est possible d’entretenir une distance par rapport à ce qui émerge de soi, comme les idées et les émotions.


La méditation en présence attentive nous offre plusieurs leçons utiles pour désamorcer les conflits.


La première, c’est de prendre quelques instants, qu’il s’agisse de 30 secondes ou de 30 minutes, pour respirer et se recentrer. Se recentrer, dans un contexte de travail, veut dire : revenir dans son rôle. Au sein d’une organisation, chacun incarne un rôle et défend une position qui est importante. Ce n’est donc pas moi ou mes idées qui avons de l’importance, mais plutôt les perspectives propres au rôle que je joue dans l’organisation. Je joue évidemment mon rôle en puisant dans mon intelligence, mon expérience, mes sensations, mes intuitions, mon interprétation de la situation, mais toujours dans l’esprit d’apporter une contribution positive à l’œuvre collective. C’est seulement en acceptant que l’autre aussi joue son rôle en puisant dans son propre vécu qu’on peut entrer dans la groan zone, ou espace de confrontation des idées, d’une façon propice à découvrir ensemble une vérité partagée par tous.


Une autre façon qu’a la méditation en présence attentive de nous enseigner à désamorcer les conflits, c’est en nous amenant à observer notre esprit, ce qui nous apprend à objectiver nos perceptions et à nous distancier de nos pensées et de nos émotions. Quand l’émotivité est présente et qu’on risque de tomber dans la zone de conflit interpersonnel, cela nous permet d’adopter une posture de spectateur, comme lorsqu’on regarde un film : l’action nous passionne sans jamais nous menacer. Se distancier ainsi de nos perceptions peut être difficile au début. On peut alors suggérer à nos collègues de prendre une pause pendant la confrontation pour faire baisser la tension. On peut dire à nos collègues quelque chose comme : « Le débat qu’on est en train d’avoir est important pour faire progresser nos idées. Mais je sens que ça devient un peu conflictuel entre nous. Je propose qu’on prenne une pause pour se détendre, question de revenir à notre débat avec un esprit plus clair et plus ouvert.»


Cette pause peut consister à prendre un café, à faire une courte promenade, ou même à méditer ensemble. De plus en plus d’entreprises reconnaissent les bienfaits de la méditation en présence attentive et intègrent cette pratique dans leur quotidien, notamment lors des réunions où ont lieu des débats importants.


Prévenir un conflit avant qu’il n’émerge peut nous faire gagner du temps et rendre les rencontres en mode groan zone beaucoup plus plaisantes, stimulantes et propices à trouver la meilleure idée. Il ne faut jamais oublier que la meilleure idée est celle qui puise dans l’intelligence collective et non celle qui s’impose parce qu’on parle plus fort que l’autre ou parce qu’on arrive à le déstabiliser émotionnellement.

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